Littérature française

Isabelle AUPY, L’Homme qui n’aimait plus les chats

Isabelle AUPY, L’homme qui n’aimait plus les chats

Les éditions du _Panseur, 2019
ISBN 978-2-4-490834-00-6

Appeler un chat un chat

Fondée au début de l’année 2019, les Éditions du _Panseur dévoilent en même temps la première œuvre de son catalogue : L’homme qui n’aimait plus les chats. Cette toute jeune maison d’édition basée à Bourg-en-Bresse n’a pas de ligne directrice mais plutôt un objectif, celui de montrer le pouvoir véhiculé par les mots, leur capacité à nous faire réfléchir et à nous transformer, peu importe le genre. Le premier né de la maison est aussi le premier roman de l’autrice : Isabelle Aupy. Cette dernière nous transporte de sa plume, dans un roman sous forme de parabole, sur une île peuplée par les chats errants et par des habitants aux personnalités bien singulières.

Sur cette petite île, que ce soient les félins ou les habitants, tous aspirent à vivre le plus librement possible. Le narrateur et sa bande d’amis, si différents soient-ils, ont leur petites habitudes au sein de l’île, nourrir les chats, se retrouver une fois par mois à la messe pour entendre le sermon du curé mais surtout le poète jouer du violon : Sergei qui s’est enfui de l’URSS, rendre visite au vieux gardien de phare Thomas… Chacun a sa place sur cette île hors du temps et de la société. Place qu’ils ne trouvaient pas autrefois sur le continent. Mais un jour, les chats qui allaient et venaient sont absents, ils ne se baladent plus dans les jardins, ils ne miaulent plus aux portes pour réclamer de la nourriture. Ils ont disparu.

La mystérieuse disparition des félins inquiète. De l’aide est demandée auprès du continent pour essayer de retrouver les précieux chats qui se sont volatilisés. Un mois plus tard, une agente de l’administration débarque du continent accompagnée de cinq drôles de cages. En sortent cinq chiens, ou plutôt des « chats » comme l’administration le précise, ils sont attribués à cinq heureux maîtres. Peu à peu les maîtres deviennent plus nombreux, ils sortent ensemble aux mêmes heures pour balader en laisse leurs « chats », ils se sentent en sécurité et aimés grâce à leurs « chats »… Les nouveaux maîtres se transforment totalement, et ne remettent pas en cause la présence de ces félins qui n’en sont pas réellement… En marge de ces joyeux amoureux des « chats » subsiste le groupe d’amis du narrateur qui lutte, mais l’administration n’est jamais loin pour s’assurer que même les plus réticents découvrent eux aussi la joie d’avoir un « chat ». Le contrôle de la population s’installe.

« Les chats, je les aime parce qu’ils ne nous ne sont pas soumis. Ils viennent parce qu’ils le veulent, non par habitude […] J’ai réalisé qu’à la question « c’est quoi un chat pour vous ? », j’aurais dû répondre : « un animal qui ne se tient pas en laisse »» (p92)

Les chiens sont devenus des chats, et cela dans tous leurs aspects : ils ont le même caractère, la même fonction. Dans le langage même un chien est devenu un chat. Une fois les idées remplacées elles peuvent disparaître totalement. Si on efface des mots, c’est pour effacer non seulement leur définition mais surtout les idées qui y sont attachées. Mais faut-il se laisser manipuler ou refuser de se laisser mener, tel un chien en laisse afin de choisir sa vie et ses idées ? De plus, faire d’un chat un symbole d’obéissance et de soumission, admettre qu’ils n’ont jamais été des animaux plus indépendants que les chiens, c’est aussi renier l’indépendance et la personnalité des insulaires. De plus, la lutte, et plus tard la révolte, contre ces « chats » qui n’en sont plus est aussi une guerre contre l’uniformisation, un combat pour défendre la liberté et la garder sous toutes ses formes.

Il est impossible de ne pas penser au chef d’oeuvre Matin Brun de Franck Pavloff ou encore au classique 1984 de George Orwell à la lecture de ce roman. Même si les parallèles et les références sont évidents, ce livre n’en n’est pas moins agréable, il s’érige comme un rappel d’aimer la liberté, un rappel de la chérir et de refuser l’enfermement dans le conformisme, mais surtout de se questionner : « Croire c’est pas vouloir savoir, confort de l’esprit, pas réfléchir et obéir bêtement. Croire c’est appliquer règles sans poser questions, pas bon pour l’homme, autre forme du pouvoir. » (p59). Il y a toujours de l’espoir pour l’homme, il suffit juste de continuer à se questionner perpétuellement face à ce qui nous est imposé, ne jamais cesser de croire en ses idées et surtout de ne pas hésiter à se révolter.

C’est avec grande hâte que nous attendons le prochain roman d’Isabelle Aupy, autrice déjà primée aux Prix des Vendanges Littéraires de 2019. Il devrait paraître aux Éditions du _Panseur en mars 2020.

Roxane Peypelut, 2A Édition-Librairie, 2019-2020

Sources :

Site éditeur
La revue des citoyens de lettres

Biographie de l’autrice :

Née en France en 1984

Kinésithérapeute au CHU de Bordeaux, elle publie son premier roman L’homme qui n’aimait pas les chats en mars 2019 aux Éditions du Panseur, roman déjà primé Coup de foudre par le prix des vendanges littéraires

Bibliographie :

A paraître : Le Panseur de mots, les Éditions du _Panseur, mars 2020

Pour aller plus loin :
Pour suivre l’actualité de la maison d’édition :

https://www.instagram.com/les_editions_du_panseur/